Prier pour nos ennemis ???

Rappel du premier message :

Bonsoir

Le Christ nous recommandait de prier pour nos ennemis, c'est aussi un enseignement du maître Soufi Tierno Bokar...

Parabole des oiseaux blancs et des oiseaux noirs

«Non seulement, Tierno Bokar s'abstenait de juger autrui, mais encore il essayait de nous faire comprendre qu'une bonne pensée est toujours préférable à une mauvaise, même lorsqu'il s'agit de ceux que nous considérons comme nos ennemis. Il n'était pas toujours facile de nous convaincre, comme le montre l'anecdote suivante où il fut amené à nous parler des oiseaux blancs et des oiseaux noirs.

«Ce jour-là, Tierno avait commenté ce verset : "Celui qui a fait le poids d'un atome de bien le verra ; celui qui a fait le poids d'un atome de mal, le verra" (Coran XC, 7 et 8 ).»

Comme nous le questionnions sur les bonnes actions, il nous dit :

- La bonne action la plus profitable est celle qui consiste à prier pour ses ennemis.

- Comment ! m'étonnai-je. Généralement, les gens ont tendance à maudire leurs ennemis plutôt qu'à les bénir. Est-ce que cela ne nous ferait pas paraître un peu stupide que de prier pour nos ennemis ?

- Peut-être, répondit Tierno, mais seulement aux yeux de ceux qui n'ont pas compris. Les hommes ont, certes, le droit de maudire leurs ennemis, mais ils se font beaucoup plus de tort à eux-mêmes en les maudissant qu'en les bénissant.

- Je ne comprends pas, repris-je. Si un homme maudit son ennemi et si sa malédiction porte, elle peut détruire son ennemi. Cela ne devrait-il pas plutôt le mettre à l'aise ?

- En apparence, peut-être, répondit Tierno, mais ce n'est alors qu'une satisfaction de l'âme égoïste, donc une satisfaction d'un niveau inférieur, matériel.

Du point de vue occulte, c'est le fait de bénir son ennemi qui est le plus profitable. Même si l'on passe pour un imbécile aux yeux des ignorants, on montre par là, en réalité, sa maturité spirituelle et le degré de sa sagesse.»

- Pourquoi ? lui demandai-je. C'est alors que Tierno, pour m'aider à comprendre, parla des oiseaux blancs et des oiseaux noirs.

- Les hommes, dit-il, sont les uns par rapport aux autres, comparables à des murs situés face à face.

Chaque mur est percé d'une multitude de petits trous où nichent des oiseaux blancs et des oiseaux noirs. Les oiseaux noirs, ce sont les mauvaises pensées et les mauvaises paroles.

Les oiseaux blancs, ce sont les bonnes pensées et les bonnes paroles. Les oiseaux blancs, en raison de leur forme, ne peuvent entrer que dans des trous d'oiseaux blancs et il en va de même pour les oiseaux noirs qui ne peuvent nicher que dans des trous d'oiseaux noirs."

Texte copier sur le site : http://www.science-et-magie.com/archives02num/sm57/5700bokar.htm

Amitié

C'est pour ça que quand on peut, mieux vaut ne pas se contenter de lire des livres, il faut essayer d'en discuter avec des lamas (j'ai abordé la question avec une petite dizaine de lamas bouddhistes).
Lorsque Matthieu Ricard dit que la vacuité est neutre c'est probablement dans le sens où elle n'est ni dans le rejet, ni dans l'attachement... Elle embrasse tout de la même compassion équanime.

Cette phrase : "L'essence de la vacuité est compassion" est de Lama Guendune Rinpotché, qui est considéré par les bouddhistes comme un Bouddha vivant. Et ce n'est pas du tout le seul maitre à le dire.

Tu l'as aussi ici dans un texte de lama Shérab Namdreul (tiré d'un enseignement de Lama Neldjorpa Shérab) "La nature de Bouddha est vacuité. La nature de la vacuité est compassion."

ici : http://www.buddhaline.net/spip.php?article719

ou là : "La véritable nature de la vacuité est compassion. Si on n'a pas expérimenté pleinement la compassion, proclamer avoir réalisé la vacuité, Shunyata, n'a aucun sens." dans un texte de Randjoung Rigpei Dordjé le 16ème Karmapa (Karmapa étant le titre du plus grand maître de la ligné Kagyu, encore un Bouddha vivant).

ici : http://www.jutier.net/contenu/karmapa2.htm

Bonsoir

Oui tout à fait Guillaume... D'ailleurs le Bouddha nous donne dans le sutra du diamant (dont tu as laissé un lien récemment) la description des "qualités" des Boddhisatvas et il apparait qu'effectivement ce désir de "libérer tous les êtres... etc." soit un effet de la compassion.

C'est-à-dire que ces notions de bien opposé au mal sont établies en soi par ce niveau qui discrimine... et qu'à un certain stade d'ouverture, il est nécessaire de passer au-delà pour laisser notre "coeur" nous guider... Mais ce "coeur" ne va pas aller à l'encontre de ce qui soutient la vie, car il en est le centre, l'essence ; il ne va pas non plus à l'encontre des écritures...

Ainsi, dans le même ordre d'idée Lao Tseu (Tao Te King) dit : "Lorsque le Tao est perdu apparaissent la charité et la justice"
C'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait les notions de justice et de charité pour servir de repère aux hommes lorsque cette connection avec le "coeur" est perdue. Mais si cette connection est un fait, charité et justice vont de soi et en ce sens il n'est même pas utile d'en parler ni même d'y penser...

C'est à la fois extrêmement intéressant, sonnant juste et peu encourageant pour le forum qui n'existera plus si tout un chacun finit par vivre cette Vérité

Magnifique explication, merci Jean-Yves !!
Tout à fait d'accord avec tout ça

L'Amour des ennemis par St Silouane:

http://www.mariedenazareth.com/15194.0.html?&L=0

Le Christ dit que le Royaume de Dieu n'est pas de ce monde ce qui montre bien qu'il s'agit d'une AUTRE réalité; par conséquent les paroles qu'il pronnonce ou les actes qu'il pose "obéissent" à cet AUTRE ordre.
Il s'est adressé à l'humanité en utilisant des paraboles.

Ainsi, lorsqu'il nous dit de prier pour nos ennemis, de les aimer, là encore il faut l'entendre au dehors du seul contexte usuel ; nos ennemis représentent d'abord tout ce que nous ressentons comme " non ami ", inamical, les motions qui découlent de notre égo. Se libérer c'est voir au sens d'accepter afin de nous affranchir de notre égo.
La prière est un état d'être, un état d'Amour....

"Priez pour vos ennemis", Hum ... interressant, vite je le deviens. Priez donc pour moi !

Tel que je comprends la phrase "Priez pour vos ennemis", j'adhère parfaitement au sujet initial de Jean Yves. Nul doute que cette phrase incite à casser les chaînes du cycle de la haine ou du ressentiment.
Peut-être est-ce là une manière de se transformer de l'intérieur et de laisser moins en moins de prise à tous ces sentiments néfastes qui parfois nous assaillent.
J'aime d'ailleurs beaucoup cette parabole des oiseaux.

Cependant si la meilleure action qui soit est "priez pour vos ennemis", que peut-on dire de "oubliez vos amis".
Ceci n'est pas dans l'esprit de contradiction, mais juste une question.
Mais c''est pas parce qu'il ai supposé dire "Priez pour vos ennemis" qu'il ai dit "oubliez vos amis".
Si je relève ainsi cette phrase c'est pour l'avoir observé de façon courante dans la vie de tous les jours.
C'est fou comment par peur d'égocentrisme, ou justement par égocentrisme on peut parfois glisser dans des concepts qui a moi me semble étrange, tellement étrange d'ailleurs que j'en trouve plein dans ma propre vie.

Par volonté de détachement ou de non attachement, on peut oublier de s'occuper de ceux dont on a la responsabilité.
Par altruisme actif et prenant, on peut oublier celui qui est devant sa porte
Par désir de faire au mieux on peut négliger des choses simples mais pourtant importantes.
Par concentration sur sa propre évolution on peut en oublier les gens qui compte sur soi.

Pourtant peut-on nier que d'une façon ou d'une autre, nous sommes liés à tout un tas de de gens qui même dans le détachement mérite notre attention ?

Pour rebondir sur la phrase de Serein, il serait quand même perturbant de faire des ses amis, ses ennemis pour leur accorder un minimum d'attention.

Prier pour nos amis c'est presque un truisme, et c'est sans doute pour ca qu'on a tendence à oublier. C'est vrai que quand on inspecte les détours de notre âme pour parvenir à prier sincèrement pour nos ennemis, nos amis s'en trouvent bien loin.

Cela dit, pendant un période j'ai participé quotidiennement au vèpres dans une maison bénédictine et il y avait toujours un temps pour les intentions de prière pendant lequel nous portions nos proches avec nous et tout ceux pour qui nous avions des intentions particulières. Donc dans la vie religieuse les amis sont loins d'être oubliés bien au contraire!

Hors contexte chrétien, Samael Aun Weor raconte qu'il s'est vu stoppé dans son évolution spirituelle parce qu'il manquait d'amour, sur le moment il ne comprenait pas pourquoi, il s'est éxaminé dans les moindres détails et finalement s'est aperçu qu'il témoignait moins d'amour à sa propre mère qu'il n'en témoignait à ses ennemis!!!

Je crois que sur ce point on pourrait distinguer deux degrés différent de prière car prier pour nos amis peut se suffire des bonnes intentions de la psyché tandis que prier pour nos ennemis nécessite que nous entrions en nous même à un niveau de profondeur ou les aléas de la vie n'ont plus d'emprise sur nous même, il s'agit d'abandonner le moi pour entrer dans l'Etre. C'est par l'Etre que l'esprit Saint intervient dans nos vies et c'est de l'Etre que proviennent la sincérité, le pardon et l'humilité. Tenter de pardonner nos ennemis avec notre petit moi sans entrer dans l'Etre c'est risquer des dissentions intérieures qui peuvent s'avérer dévastatrices pour la personnalité. En spéculant, on pourrait même dire que c'est induire une passivité de l'âme face à l'altérité, ce que n'est pas la prière et le pardon véritable des ennemis dans le Christ qui au contraire alimente et spiritualise l'expérience qui est vécue.

N'en revient-on pas à ce fameux concept d'équilibre finalement ?

Quand on entreprend une démarche sur soi, il existe sans doute un point quelque part qui sert d'ancrage, ancrage au sens éviter de se perdre.

Prier pour ses ennemis c'est sans doute faire un grand travail sur soi, sur tout ce reflet de nous même qui nous pousse à définir des ennemis.
Mais c'est peut-être aussi nous confronter à d'autres leviers de notre être, leviers que sont nos affections, nos responsabilités, nos amis, notre sens en ce monde.

Lorsque dans la vie se produit le conflit conscient ou non, observé ou non, entre nos objectifs spirituels et le "rappel à la réalité d'ici bas", il y a parfois de quoi enrailler ou emballer la machine de notre conscience.

Par exemple en ce moment je prie ou du moins j'essaye d'agir favorablement envers un "ennemi". Ennemi pas au sens de l'inimité mais au sens que cela va à l'encontre de ce que j'aurais souhaité pour moi.
En gros je suis jaloux ou envieux de quelqu'un, et "travailler" en tant qu'amis au bonheur de cet autre, adversaire par nature humaine, me rendra malheureux.
Finalement peut-être devrais-je passer en amnésie, pour ne pas être spirituellement hypocrite. Mais c'est insoluble car je souhaite quelque chose qu'une partie de moi ne souhaite pas.
Bien sur vous me parlerez de "recul", de "soi", "d'être", de "réalité qui n'est pas la réalité", etc..
Je sais tout ça, je sais aussi que ça va passer, je sais aussi que je ne bougerais pas de ma décision "morale" et que c'est ce que je dois faire pour être en accord avec moi même.
Mais ce n'est pas totalement sincère et ça je le sais aussi, car je me mens d'une certaine façon et même bien dans un réalisme un peu cynique, un peu trop lucide, pour se prévaloir d'une qualité morale ou spirituelle.

Cela me pousse à une autre question, comment faites vous pour être sincère ?
Prier pour ses ennemis ça coule pas forcément de source, les mots "lutter", " se cacher" sont peut-être là.
Peut-être est-ce pour ça que tant de gens oublient, leur proches, leurs situation pour se consacrer à des concepts plus élevés.
Mais-est-ce qu'on oublie vraiment ou est-ce qu'on se voile la face ?

Bonjour Loryan,

Si tu ne le connais pas je te propose un livre qui t'apportera des éléments concrets : " Lâcher prise" de Guy Finley.

Vraiment bien !

Loryan a écrit:

Cela me pousse à une autre question, comment faites vous pour être sincère ?
Prier pour ses ennemis ça coule pas forcément de source, les mots "lutter", " se cacher" sont peut-être là.
Peut-être est-ce pour ça que tant de gens oublient, leur proches, leurs situation pour se consacrer à des concepts plus élevés.
Mais-est-ce qu'on oublie vraiment ou est-ce qu'on se voile la face ?

En ce qui me concerne, puisque que je ne peux parler que de ma propre expérience, sur l'instant je ne fais rien pour être sincère, je constate simplement que je suis sincère ou que je ne le suis pas, sachant que rien n'est tout blanc ou tout noir, le plus souvent je constate un manque de sincérité mais pas une absence complète de sincérité. Je pense que c'est le cas de tout ceux qui aspirent à la sincérité. En fait la sincérité dont je fais preuve envers autrui est une expension de la sincérité dont je fait preuve envers moi même. Lorsque je suis sincère envers moi même alors je ne fait qu'un et je ne peux qu'être sincère envers autrui, par contre si je manque de sincérité envers moi même innévitablement celà se traduit dans ce que j'exprime. Ce que l'on exprime porte la marque de ce que l'on est. Si je vous témoigne avec sincérité mes sentiments c'est parce que je m'en témoigne d'abord à moi même, si je manque de sincérité dans mon témoignage c'est qu'il y a des choses que je n'accepte pas, des chose auxquelles je ne suis pas encore près à faire face, je manque d'intégrité. Je crois que c'est avant tout un travail d'auto-observation, souvent le manque de sincérité provient de la mécanicité des moi psychologique qui sont sollicités et entrent en action avant même que nous n'ayons donné notre consentement. Ce sont ces moi psychologique qui manquent de sincérité du fait de leur nature. Pour faire simple la sincérité c'est le coeur à coeur, prier pour nos ennemis c'est aussi entrer en coeur à coeur avec eux. Mais prier pour ses ennemis n'élude pas forcément les tensions bien présentes, mais quand on se reconnait pour ce que nous sommes, les tensions aussi sont reconnues pour ce qu'elles sont.

Pardonner est deja un pas en avant. Apres prier, dans le sens litteral, pour ces ennemies me parait bien difficile. Je prefer émettre une intention a Dieu pour que le conflit ou la tension trouve une solution. Pardonner permet de nettoyer le coeur de ses mauvaises énergies émotionnelles et c'est deja beaucoup. Prier pour ces ennemies me semble etre plutot une bienveillance au quotidien qui peut aller de la compassion a remettre en place certaines personnes quelque peu irrespectueuses.

Si tu les as pardonné qu'est ce qui t'empèche de prier pour eux? Ce qui me paraît le plus difficile de mon point de vue c'est de pardonner parce qu'il n'y a pas besoin d'être remplis d'amour pour prier bien au contraire. On peut très bien dire: "Seigneur je suis remplis de colère et de haine envers untel et je n'en veux pas parce que j'en souffre et que je fais aussi souffrir les autres avec, alors comme je suis trop faible pour y arriver tout seul et bien je te la donne et débrouille toi avec, moi je n'en veux pas !!! Si c'est pour aimer notre prochain je crois que Dieu ne nous en voudra pas de décharger notre colère sur lui, on a le droit de poser notre tête sur son épaule et de crier tout fort comme un bébé.

D'ailleurs c'est un aspect intéressant, je pense qu'il faut être un bébé pleurnichard pour Dieu, un bébé pleur quand quelque chose ne va pas et il pleur pour appeller sa mère parce qu'il dépend d'elle, être un bébé pleunrnichard finallement c'est crier notre faiblesse à Dieu dans la confiance et l'humilité.

N'ayant pas réellement d'ennemis puisque ce n'est pas dans ma nature je me base sur les différentes relations d'adversités qui surviennent ici et là.

Dans mon raisonnement je pars du principe que toutes formes d'adversité temporaire, de gens contrariant, de réactions égotiques vis à vis d'autrui, de conflits d'intérêts sont de même nature que de se définir un ennemi ( au sens littéral je dirais qu'un ennemis est une sorte d'adversité forte sur le long terme )

Ce qui parfois me pousse à classer certains amis parmi mes ennemis, parce que voilà parfois avec les réaction émotives.. on s'engueule ou on se fait la gueule.. on se comprend pas, on se jalouse, ou tout simplement on se cherche un bouc émissaire inapproprié mais compatissant.
Et d'expérience la "gestion" de cette poussée irrationnelle d'inimité est vitale si on en veux pas lui donner une réalité une importance, une raison d'exister.

Le plus dur... c'est de faire le premier pas. Accepter le fait qu'on se soit emporté, trompé et que c'est à nous de calmer le jeu pour ne pas se laisser bouffer par la colère ou le ressentiment.
Plus dur encore.... faire le premier pas quand on est persuadé que c'est l'autre qui a tord ou qui a commencé, parce qu'il faut pardonner.
Pardonner sans fausse modestie, sans calcul relationnel... et trouver une raison de pardonner sans avoir de raison pour être sincère

Je trouve ce moment du pardon à chaud le plus difficile de tous, parce que de cet instant naitra ou naitra pas la frustration, le ressentiment, l'ennemi.
Il m'a toujours semblé plus facile de se pardonner avec le poids des années, car on se fait plus facilement une raison, que sur l'instant.

Un dernier point, se pardonner à soi même, car souvent l'ennemi n'existe que parce qu'on est l'ennemi de soi même. En gros l'autre a bon dos, il est le réceptacle idéal de toutes nos peurs