Merci et paix à toi solasido
Que le Verbe nous honorent, voila quelques sublimes vers : _______________________________
VII. RÉALISATION(1)
Vois, frère, le grand vent de la Gnose a soufflé :
Y a tout balayé, le voile de l'Illusion
Et les liens de Maya !
Les deux pôles de l'indécision ont été arrachés,
Et le faîte de l'aveuglement emporté !
A terre gît le toit du désir,
Le vase du mal a volé en éclats !
Quand le vent a cessé, tant de pluie est tombée,
Qui inonda de joie ton humble serviteur !
Dit Kabir : lorsqu'à nouveau s'est levé le soleil,
En moi la lumière a brillé !
(2)
J'ai bien souvent changé de vêtements :
C'est la dernière fois que j'en revêts !
Les cordes de l'instrument sont maintenant usées :
Je suis tombé sous le pouvoir du Nom !
Mon mental a cessé de battre le tambour :
je ne danserai plus à son rythme endiablé !
Luxure, colère, erreur : j'ai tout jeté au feu,
Et j'ai brisé le vase de la cupidité !
La robe du désir est maintenant usée,
Et l'illusion s'est dissipée !
J'ai reconnu l'Un dans toutes les créatures :
Finies les polémiques et les joutes oratoires !
Dit Kabir : par la grâce de Ram,
Je l'ai trouvé, Lui, le Suprême !
(3)
Même en offrant de l'or, on ne peut gagner Ram :
On ne peut Le gagner qu'au prix de son coeur !
Maintenant que Ram est mien
Mon coeur a retrouvé la paix !
Malgré le flot de sa parole,
Brahma ne put découvrir Ses limites !
Ram a Sa demeure chez le dévot
Qui reste assis en paix !
Je me suis libéré de mon mental instable,
Dit Kabir, pour me mettre au seul service de Ram !
(4)
Roi Ram, Tu es le Sans-Peur !
Roi Ram, Tu es notre Sauveur !
Quand j'étais, Tu n'étais pas :
Je ne suis plus et maintenant Tu es.
Maintenant, Toi et moi sommes Un :
Je ne vois plus que l'Un.
Avec mes facultés, j'étais seul et sans force,
Mais la sagesse est la vraie force !
Dit Kabir : ma volonté s'en est allée
Et j'ai atteint la perfection !
(5)
Je suis en tout, tout est en Moi.
Je suis : nul n'existe hors de Moi.
Je suis partout dans les trois mondes
Et le cycle des vies n'est que Mon jeu à Moi.
Les six philosophies décrivent Mon vêtement,
Mais je transcende tout, les symboles et les formes
Moi-même, j'ai pris ce nom de Kabir.
Moi-même, de Moi-même, j'ai tout manifesté.
(6)
Je suis en tout, tout est en Moi.
En myriades de vies, je suis manifesté,
Et pourtant, je transcende tout.
Appelez-moi Kabir, appelez-moi Ram :
Cela revient au même !
Je transcende tous les âges, l'enfance et la vieillesse,
Et je suis hors d'atteinte des folies de la jeunesse.
Sous les ordres d'aucun, ni lié à personne,
En l'état de Sahaj, ma joie est toujours neuve !
Je suis vêtu d'un simple drap,
Et les gens se moquent de moi.
Mon état de tisserand n'inspire aucun respect ;
Ma robe toute trouée est rapiécée plus de dix fois.
Par-delà les gunas, par-delà le karma,
Au royaume de la joie, j'ai pris le Nom de Ram.
Je vois, le monde entier, le monde ne peut me voir :
Tel est l'état unique que Kabir a atteint !
(7)
Lorsque j'étais, qui donc était ?
Tous étaient en Moi !
Dis-moi, ô Ram, alors comment Te priait-on ?
0 Dieu, donne-moi une réponse claire !
Si je dis la vérité, aussitôt on me frappe :
Le menteur s'accorde avec le menteur !
L'aveugle prétend qu'il a tout vu,
Celui qui a des yeux pour voir est ébloui !
Je le déclare tout haut à qui voudra me croire :
N'aie de mot à la bouche qui ne soit dans ton coeur !
Dit Kabir qui sourit : ô frère, quoi que je dise
N'est pour toi qu'un tissu de mensonge !
(8 )
Là où il n'y a ni pluie, ni océan ;
Ni soleil, ni ombre ; ni création, ni destruction.
Là où il n'y a ni vie, ni mort ;
Ni peine, ni plaisir.
Là où il n'y a ni conscience du Vide,
Ni quiétude du Samadhi,
Au-delà des mots, ami,
Est cet état unique de Sahaj.
On ne peut ni Le peser, ni Le sonder ;
Il n'est ni lourd, ni léger.
Il n'a ni haut, ni bas,
Et ne connaît ni jour, ni nuit.
Là où n'existent ni vent, ni air, ni feu,
Là est la demeure du Sadguru.
Il est inaccessible et incompréhensible,
On ne peut L'atteindre que par la grâce du Guru.
Dit Kabir, je m'abandonne aux pieds du Guru,
Auprès duquel je reste pour toujours absorbé !
(9)
Qui meurt ? Qui naît ?
Qui donc obtient le ciel et qui obtient l'enfer ?
De l'Inconditionné viennent les cinq éléments :
Bien que manifestés, ils sont toujours en Lui !
Ils se sont séparés puis résorbés en l'Un,
Sans laisser nulle trace ni le moindre désir !
La jarre est dans l'eau et l'eau est dans la jarre
Dehors et dedans, c'est toujours la même eau !
La jarre s'est brisée, l'eau s'est mêlée à l'eau :
Telle est la Vérité proclamée par les Sages !
A l'origine l'espace et à la fin l'espace,
Au milieu rien que l'espace !
Dit Kabir : qui donc est prisonnier du karma !
Illusoires sont vos craintes !
(10)
Je me suis Perdu dans l'Un,
Et suis devenu Un en tout.
Je suis en tout et tout est Moi :
Autre que l'Un n'existe pas !
(11)
Qui a connu l'Un a connu le Tout.
Qui n'a pas connu l'Un n'a rien connu !
(12)
J'ai pris place sur le Trône
Où le nectar a étanché ma soif.
Maintenant Ram et Kabir sont un :
Plus rien ne les distingue !
(13)
L'Un produit le multiple,
Et le multiple retourne à l'Un.
Lorsque l'Un est connu,
Tout dans l'Un disparaît !
(14)
Lorsque j'étais, Dieu n'était pas :
Lorsque Dieu est, je ne suis plus.
Sa lumière a fait fuir l'ombre de mon moi !
(15)
Qu'une goutte tombe dans la mer,
Tout le monde peut le comprendre.
Mais que dans une goutte la mer soit contenue,
Qui peut saisir cela ?
(16)
Qu'une goutte tombe dans la mer,
Tout le monde peut le comprendre.
Mais que la mer tombe dans une goutte,
Qui peut saisir cela ?
(17)
Ô mon âme, à force de chercher,
Kabir a disparu.
Quand la goutte se perd dans l'océan,
Où trouver cette goutte ?
(18)
Ô mon âme, à force de chercher,
Kabir a disparu.
Quand l'océan se perd dans la goutte,
Où trouver l'océan ?
(19)
L'eau donne la glace : la glace donne l'eau.
Elle redevient ce qu'elle était : que dire de plus ?
(20)
Réalisant ton Soi, tu réalises en toi
La parfaite harmonie.
Toujours serein, quoi que tu puisses entendre ou dire,
Car le Soi intérieur est immuable !
(21)
Si Dieu devait mourir, alors je mourrai :
S'il ne meurt pas, pourquoi devrai-je mourir ?
En Lui je me suis immergé, devenant immortel :
J'ai plongé dans l'océan de la Béatitude !
(22)
Dit Kabir : mon mental fut pacifié
Par la connaissance de Brahman,
Et le feu qui consumait le monde
Est pour moi devenu de l'eau.
(23)
Leur degré de sagesse commande le niveau de leur foi.
Saisir la Gnose de Dieu n'est pas chose aisée :
Nul ne l'a pleinement perçue !
(24)
L'Un entre dans le tout, le tout entre dans l'Un.
Kabir entre dans la Gnose, où l'Un est sans second !
(25)
Qui sert l'Un sert toutes choses ; mais si l'on sert toutes choses
Alors l'Un disparaît !
Qui arrose la racine voit pousser
Fruits et fleurs à profusion !
(26)
Il n'y a plus rien à dire, car j'ai dit
Tout ce qui pouvait l'être !
Il ne reste que l'Un, tout autre a disparu
Et la vague est retournée à l'Océan !
(27)
Le mental de Kabir est pur comme l'eau du Gange.
Hari court après lui en criant : " Kabir ! Ô Kabir ! "
(28)
Mort est mon mental et faible mon corps.
Hari court après moi en criant : " Kabir ! Ô Kabir ! "
(29)
Si tu dépends d'autrui, tu es dans la douleur ;
Si tu ne dépends de rien, de quoi aurais-tu peur ?
Qui est indépendant voit en Indra un gueux !
(30)
Passant par le bazar,
Je les ai tous bénis,
Et je ne suis pourtant de personne
Ni l'ami, ni l'ennemi !
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KABIR - Le fils de Ram et d'Allah
Poèmes présentes et traduits
du hindi par Yves Moatty - Les Deux Océans Paris
Cordialement.